mercredi 27 janvier 2010

Mais que disent les socialistes?

Martine Aubry a fait ce mardi 26 janvier une apparition fantomatique sur TF1. Contraste saillant avec la longue intervention de Nicolas Sarkozy la veille sur FR 2. Le président actuel certes on aime ou pas, c'est selon. Mais au moins on ne peut pas ne pas reconnaître que son intervention d'hier est en cohérence avec sa position, son caractère et sa fonction. Du reste chacun pour ou contre semble y avoir trouvé son compte et ce qu'il attendait: pour les uns il a été bon, clair, offensif… pour les autres mauvais, nul, inquiétant…
Alors Martine Aubry dans tout ça? Ou plutôt le PS tel qu'elle est censée le représenter voire le "piloter"? Où en sont-ils et que nous proposent-ils? Comme toujours depuis maintenant quelques années la baronnie PS semble ressasser de vieilles lunes, mais nouveauté elle s'introspecte!
Le PS adopte un style nouveau, minimaliste et allusif, grâce à Martine Aubry qui semble avoir découvert deux vertus politiques majeures à la veille des prochaines élections européennes:
  • la discrétion: soucieuse de ne pas trop s'avancer à contretemps et de ne pas prendre des risques inconsidérés au moment même où les sondages la donnent toujours en hausse, la première secrétaire du PS choisit de régler son pas dans celui de la majorité et du président, pour le critiquer. Afin de ne pas se discréditer par des avancées intempestives elle adopte une communication réservée et vague: certes Nicolas Sarkozy a tout faux (comment en irait-il autrement quand c'est l'opposition et le PS en particulier qui s'exprime à deux mois des échéances régionales). Mais on  se contentera de le dire "en général". Ainsi madame Aubry assène-t-elle un diagnostic profond de la prestation du président de la république: "inquiétant","n'apporte pas de solutions", "en panne de réponses", "en grand décalage". 
  • le principe de contradiction qui semble être une spécificité de la rhétorique socialiste actuelle: un jour on dit une chose, quelques jours après autre chose, voire le contraire, mais en assurant n'avoir pas varié et de dire toujours la même chose depuis le début. Et en tout cas ce qu'on dit le plus haut et fort est en général ce qu'on ne fait pas. Ainsi la cacophonie sur la question des retraites: il y a environ dix jours Martine Aubry acceptait le principe d'un report de l'âge de la retraite à 61-62 ans (avec il est vrai quelques réserves sur la pénibilité et l'emploi des séniors), mais le lendemain Benoît Hamon (porte parole du PS ou garant de son aile gauche?) est monté au créneau et un Bureau National récent a désavoué le choix de sa première secrétaire et lui a signifié le maintien à 60 ans. Résultat, comme l'écrit le Monde "la première secrétaire a donc finalement fait sienne la position officielle du bureau national". Toujours aussi intéressant de voir qui gouverne vraiment au PS, apparemment toujours  les courants et leurs principaux barons. Mais alors les militants? Et les électeurs qui aimeraient avoir leur mot à dire sur la question étant donné que ce sont leurs retraites qui sont en jeu? Ben euh, disons que ce sera pour plus tard…
Moralité le PS joue encore et toujours à la rénovation sans la faire concrètement à travers des actes forts et assumés. On voit bien la force et l'unité de la majorité de madame Aubry qui la contraint à s'adapter dans sa posture et dans son discours et ne lui laisse pas la place d'une ouverture et d'une modernisation authentiques. Si Martine Aubry veut éviter ce qui est arrivé à Ségolène Royal, c'est à dire d'être proprement lâchée et trahie par les principaux cadres et les principales structures,  lignes de force, sensibilités ou courants de son parti, qui ne constituent pas nécessairement la majorité de ses militants, loin s'en faut, elle est d'ores et déjà obligée de rester pieds et mains liée à tous ceux qui l'ont mise à la tête du parti, certainement moins pour ses beaux yeux ou ses nouvelles boucles d'oreille que pour leurs propres positions éligibles, en local notamment. A l'image de ce qui vient de se passer, elle avancera donc toujours des propositions auxquelles elle sera à répétition obligée de renoncer.  Mais plusieurs experts du PS pensent que ce sont toujours des ballons lancés et qu'on peut rattraper, en attendant de voir les réactions de l'opinion. Il va de soi que dans de telles conditions, l'exercice politique principal que le parti socialiste devra répéter à l'envi consistera à dissimuler le clivage entre les projets envisagés et les intentions affichées, autrement dit de s'ingénier à ne pas laisser transparaître une fois encore la guerre intestine qui déchire ses rangs tant du point de vue des personnes que de celui des idées et des diagnostics.

C'est dans la même perspective qu'à l'approche des régionales où le dernier sondage IFOP donne encore la gauche (qui bien évidemment s'en réjouit et jubile) en progression, il n'est donc pas bon de prendre trop de risques avec une base électorale censée se mobiliser prioritairement à gauche ,mais qui pourrait se sentir échaudée par les intentions d'abord affichées puis retirées de la première secrétaire. Le pas de deux d'avant en arrière de celle qui devrait positivement représenter une opposition démocratique et constructive soudée et étayée sur des propositions alternatives approfondies et non sur les habituels lieux communs de la polémique, s'apparente finalement à un déni symptomatique d'une position entravée et inhibée, qui manque à la fois de clarté et de personnalité.

Dans de telles conditions nationales on peut déjà craindre le pire si la région Île de France doit repartir pour un mandat de six ans derrière la liste de Jean-Paul Huchon, conduite dans le Val de Marne par Michelle Sabban, ex-première secrétaire fédérale du Val de Marne, chasseuse de tête des Strauss Kahniens, en charge il y a peu de se débarrasser notamment des militants rénovateurs, en particulier ségolénistes (comme elle n'avait pas hésité il y a quelques années à se débarrasser des socialistes de Boissy Saint-Léger en les excluant de la fédération du PS). Il n'y a vraiment rien à espérer de positif et de constructif de la reconduction d'une telle liste socialiste. Bien que l'ex première fédérale ait été écartée après le glorieux Congrès de Reims de la direction de la fédération du Val de Marne, cela ne l'aura pas empêchée de se faire investir tête de liste, en constituant une alliance faite de bric et de broc et totalement contre nature. Il est vrai que l'éclatement interne de la démocratie au PS fait qu'on ne sait plus exactement quelle est la nature de ce parti, écartelé entre des structures rigides n'ayant rien à envier au PCF dans les pires moments de son histoire et une vision socio-démocrate beaucoup plus souple).

C'est ainsi que quelques rares récupérateurs opportunistes du courant Ségoléniste ont surtout surfé sur les  élections présidentielles et alii ainsi que sur le dernier Congrès pour se mettre en avant. L'un est devenu lieutenant auprès de Ségolène à Désirs d'Avenir Bvd raspail (ce qui n'est pas sans inquiéter sur l'état dans lequel doit se trouver Ségolène ainsi entourée d'une telle dose d'opportunisme), l'autre précisément promu second juste derrière Mme Sabban sur la tête de liste PS 94 des régionales. Ils auront donc vite et bien rejoint les rangs d'une liste avec laquelle initialement ils n'avaient rien à faire. Et au plus grand mépris de la démocratie participative qui pour eux n'est en fait qu'un mot passe-partout, on peut voir par exemple que le numéro deux de cette liste dans le val de Marne est lui même un spécialiste du pas de deux : à l'occasion du Congrès notamment où il se présentait comme candidat pour accéder à la tête de la fédération, aussitôt le Congrès sur les motions passé il s'était rétracté malgré ce qu'attendaient ses militants. Les deux compères, sans aucun scrupule envers le choix des militants ont réussi le tour de force en forme de mini putsch de faire croire que l'alliance qui en ressortirait avec les composantes liguées dans un TSS assassin (Tout Sauf Ségo) seraient malgré tout avantageuse. Avantageuse au juste pour qui? Et pour quoi? La situation réelle de la liste actuelle pour les régionales en Île de France parle d'elle même. C'est un patchwork sans queue ni tête, sans aucune unité de fonds et sans aucune logique de compétences et de programme, où ne s'agrègent que des ambitions régionales, municipales et individuelles.

Qui peut vouloir reconduire une région à gauche dans de telles conditions? Il est à parier que la gestion de la région sera la première à pâtir et sera sacrifiée sur l'autel des calculs d'apparatchiks locaux, l'essentiel de leur énergie se portant sitôt élus sur les prochaines échéances nationales.
Lorsqu'on compare avec la dynamique enclenchée par la droite dans ces régionales et en particulier en Île de France (tête de liste Valérie Pécresse, actuelle ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche) et notamment dans le Val de Marne (tête de liste Laurent Lafon, maire de Vincennes), on ne peut qu'être étonné par la différence d'approche des campagnes qui commencent.
Là où le PS martèle des messages passéistes (leur bilan qui serait excellent, a minima on peut quand même douter), réactifs et agressifs (en guise de réponse aux demandes de la droite par exemple sur les problèmes concrets du RER A, on passe son temps à cogner sur Sarkozy d'où émaneraient tous les maux) ringardisée avec une liste hétérogène et vieillotte, l'alliance de droite UMP Nouveau Centre quant à elle impulse une dynamique conquérante, renforcée par des positions plus homogènes, des choix clairs et assumés et des personnes jeunes et nouvelles. Sans être nécessairement du même "bord" politique  comme on dit que les représentants de cette liste, elle inspire à ce jour une bien plus grande confiance par la compétence dont font preuve dans leurs domaines respectifs nombre de ses représentants. Vincennes et les Vincennois qui ont l'honneur d'être représentés au plus haut niveau avec cette liste grâce à leur jeune maire Laurent Lafon ne devraient pas manquer de saisir  toute l'importance de l'enjeu du vote des 14 et 21 mars 2010 et de soutenir par tous les moyens le renouvellement et le changement.
Après tout les règles d'alternance auxquelles les socialistes appellent si constamment de leurs vœux ne doivent pas s'appliquer exclusivement au national; elles doivent régir tous les niveaux de la vie politique et des élections et ce pour le plus grand bien de la  démocratie!


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